Comment permettre l'accès à l'énergie à tous
sans mettre en péril les équilibres naturels ni la santé humaine ?

Il y a dix ans, le Plan des colibris indiquait comme grande direction dans le domaine de l’énergie : « Permettre l'accès à l'énergie à tous, avec la plus grande autonomie possible, sans mettre en péril les équilibres naturels (température du globe, biodiversité, ressources naturelles) ni la santé humaine. »
Ce Plan développait 5 axes prioritaires pour engager une mutation de notre modèle énergétique :
– De l'ébriété à la sobriété
– Faire mieux avec moins (rechercher la plus grande efficacité énergétique)
– Développer les énergies renouvelables
– Abandonner les énergies fossiles et fissiles
– Relocaliser, autonomiser, décentraliser

L’évolution en dix ans


Quel bilan depuis dix ans ? Si l’Accord de Paris a semblé poser une volonté forte pour répondre aux défis climatiques, force est de constater que cela ne se traduit pas dans les faits ou bien trop lentement. Si la consommation d’énergie est en très léger recul en France (sans compter la baisse historique – mais très temporaire – de 8% de la consommation d’énergie en 2020, liée à la crise du Covid), elle est bien loin de la baisse nécessaire – diviser par 3 notre consommation d’ici 2050. Surtout, les changements structurels pourtant nécessaires n’ont pas vu le début d’une mise en œuvre : baisse de la dépendance aux énergies fossiles, sobriété, développement des énergies renouvelables (ENR). L’évolution des ENR n’est que de 5 % sur les dix dernières années, modifiant assez peu le mix énergétique français, toujours majoritairement nucléaire et issu des produits fossiles (pétrole et gaz). La rénovation thermique des bâtiments, essentielle pour faire baisser consommations, n’est pas menée de façon suffisamment volontariste.

Les enjeux aujourd'hui

Les défis auxquels nous étions confrontés il y a dix ans restent quasiment inchangés. Si ce n’est que le taux de CO2 a continué d’augmenter (de 393 ppm en 2012 à 416 aujourd’hui), rendant toujours plus improbables les scénarios les plus optimistes. De plus, les ressources pétrolières continuent de se tarir et l’instabilité géopolitique contribue à en accentuer l’augmentation des cours. La précarité énergétique menace de plus en plus de personnes, même dans les pays riches.
L’ère des énergies facilement accessibles et bon marché est sur le point de s’achever. Les solutions semblent connues, mais est-ce si simple ? Les conséquences sur nos sociétés sont incommensurables. Il suffit de regarder autour de nous : nos vêtements, nos meubles, nos maisons, nos machines diverses... Tous ces objets ne peuvent être produits sans une grande quantité d’énergie accessible. Et même les techniques actuelles de production des énergies renouvelables ne sont pas sans conséquence : utilisation de matières premières non renouvelables – parfois critiques –, et pollution associée, utilisation de ressources et d’espaces agricoles, intermittence des productions...
La question de l’énergie est en réalité plus profonde, multiple. Elle interroge d’une part nos besoins essentiels et notre confort. Mais aussi comment satisfaire ces besoins. Par quelles technologies – « high-tech ou low-tech » ? L’option nucléaire est-elle à retenir ? Les réseaux de production et de distribution peuvent-ils être en partie relocalisés, et de quelle manière ? Les choix doivent-ils être d’abord ceux des experts, de l’industrie ou celui des citoyens et des pouvoirs publics ? Enfin, l’énergie doit-elle être entièrement régie par les forces du marché, ou bien revenir dans le giron public ? En somme, à travers ces immenses défis énergétiques c’est toute la question du modèle de société et de consommation qui est en cause. Une société de l’opulence matérielle, avec les consommations énergétiques qui en découlent, ou une société de la sobriété ? Une société verticale, technocratique – où le pouvoir est aux mains de experts –, ou réellement démocratique ?

Une consultation pour construire les défis de l’avenir

Depuis la création de l’association il y a 15 ans, le Mouvement Colibris s’est mobilisé sur ces défis : par la sensibilisation, avec des livres, des films ; à travers des centaines d’actions de terrain avec des groupes locaux ; par des formations en ligne ; en soutenant la création d’habitats collectifs plus autonomes au niveau énergétique, ou d’initiatives pour les énergies renouvelables. Avec la campagne Nouvelle (R), nous pensons que ces questions énergétiques doivent être travaillées à toutes les échelles : mondiale, européenne, nationale, régionale... mais aussi, et surtout, sur nos territoires, dans nos bassins de vie. Au travers des « défis de territoire » à expérimenter : recherchons ensemble comment nous pouvons gagner en autonomie, en sobriété, et émettre moins de gaz à effet de serre à l'échelle individuelle et dans nos territoires de vie. En veillant partout à inclure les populations en situation de précarité énergétique dans les décisions.
Cela, pour une meilleure qualité de vie pour toutes et tous, en respectant le vivant sous toutes ses formes, et en restant dans les limites que nous fixe notre planète.


Notes