L'engagement citoyen au cœur du Chant des Colibris
Par Gabrielle Paoli / Colibris - 1 juin 2017
Samedi 27 mai, le Chant des Colibris posait ses bagages à Strasbourg, pour la sixième et avant-dernière date de la tournée avec, au programme, une conférence sur l’engagement citoyen au cœur du changement de société.
Cyrille Bombard, Thierry Kuhn, Cécile Favé, Mathieu Labonne et Cyril Lage le 27 mai à Strasbourg
C’est sous une chaleur intense que l’équipe du Chant des Colibris prend ses quartiers samedi 17 mai au matin à la Laiterie, un site culturel installé sur une ancienne friche industrielle. Premier événement de la journée avant le concert du soir, la conférence "l'engagement citoyen au cœur du changement de société" commence à 11h.
Pedro, le régisseur lumière de la tournée, signe comme à son habitude un plateau d’une grande beauté. La scène est obscure, avec pour seul éclairage les féériques guirlandes lumineuses devenues la signature du Chant des Colibris. Partant du fond de la scène pour aller jusqu’au fond de la salle, ces fils de lumière unifient l’espace, rapprochent le public de la scène et créent une atmosphère intimiste. Dans le fond, trois immenses panneaux turquoises annoncent l’Appel du monde de Demain.
"Il n’y a pas d’ennemis, et nous avons tous entre nos mains le pouvoir de régler la plupart des problèmes."
Sous ce chapiteau de lumières, deux cent personnes sont réunies pour écouter et intéragir avec Thierry Kuhn, président d’Emmaüs, Cyril Lage, président-fondateur de Parlement & Citoyens, Cécile Favé, co-créatrice du Stück (la monnaie locale de Strasbourg), et Mathieu Labonne, directeur de Colibris. L’animateur de la journée, Cyrille Bombard, coordinateur du pôle Relier à Colibris, ouvre le moment avec un court brise-glace. Chacun est invité à s’adresser à son voisin pour partager sa vision de l’engagement citoyen. À leur tour, les intervenants font part de la leur. Pour Thierry Kuhn, l’engagement est étroitement lié à la solidarité. Mathieu Labonne envisage de son côté l’engagement comme une prise de conscience : "pour moi, il n’y a pas d’ennemis, et nous avons tous entre nos mains le pouvoir de régler la plupart des problèmes."
Thierry Kuhn, Président d'Emmaüs
L’IDENTITÉ AU CŒUR DE L’ENGAGEMENT
Chez Emmaüs, l’engagement est un vecteur d’épanouissement pour ceux qui y sont actifs. “Grâce à l’engagement, des gens ordinaires font des choses extraordinaires, souligne son président. Des personnes à qui la société disait qu’elles n’étaient rien deviennent quelque chose grâce à la solidarité.” Chez Emmaüs, c’est bien le cœur de sa propre identité que l’on touche lorsqu’on se met au service de la cause collective.
"Grâce à l’engagement, des gens ordinaires font des choses extraordinaires"
Cécile Favé témoigne alors de ce qu’a été l’engagement pour elle, au sein du Stück. “S’engager, c’est avoir envie d’apprendre et de grandir ensemble.” Au-delà de cette mobilisation personnelle, Cécile Favé met en lumière le caractère profondément enrichissant de l’engagement. “C’est une façon de se découvrir dans ses forces et ses faiblesses, dans ses désirs aussi, et de tirer du collectif une dynamique pour se développer soi-même.”
“S’engager, c’est avoir envie d’apprendre et de grandir ensemble.”
LE MONDE ASSOCIATIF : D’UNE STRUCTURE VERTICALE À DES PRATIQUES D’EMPOWERMENT
Mathieu Labonne souligne quant à lui combien la forme de l’engagement citoyen s’est transformée au fil du temps. “On ne peut plus attendre des gens qu’ils adhèrent à une structure pour 25 ans et s‘oublient dans leur individualité au service d’une cause. Ça ne marche plus comme ça.” Chacun est désormais davantage enclin à s’intéresser à plusieurs causes différentes en même temps, à être plus ou moins investi selon les époques de la vie. Pour le directeur de Colibris, une nouvelle posture doit être adoptée par les associations. L’enjeu est de pouvoir dire aux citoyens qui s’engagent : “Venez pour vous, faites ce que vous voulez faire et pas ce que la structure vous dictera de faire.” L’association de demain n’est plus dans la posture de comptabiliser et diriger les bénévoles, mais de leur donner les moyens de mener l’action qui leur correspond. C’est alors qu’un homme réagit dans la salle en citant l’Abbé Pierre : “C’est quand chacun de nous attend que l’autre commence qu’il ne se passe rien.” Pour ce participant, en effet, “on ne doit pas attendre que les structures associatives dictent les tâches à accomplir.”
"On ne peut plus attendre des gens qu’ils adhèrent à une structure pour 25 ans et s‘oublient dans leur individualité au service d’une cause."
Et Cyril Lage de rebondir en expliquant comment Parlement & Citoyens s’est également construit dans cette dynamique d’”empowerment” [favoriser la capacité d'agir, NDLR]. Cette start-up est à l’origine d’une plateforme numérique permettant aux parlementaires d'associer les citoyens à la rédaction de leurs propositions de loi (Voir notre parcours découverte sur la démocratie contributive ). L’ancien schéma aurait certainement voulu que, pour les législatives, l’association demande à ses bénévoles d’écrire à tous les candidat∙e∙s de France pour leur parler de démocratie participative. Aujourd’hui, Parlement & Citoyens innove : l’association propose un kit de campagne permettant à chacun et chacune d’aller convaincre ses candidat∙e∙s aux législatives, s’ils le souhaitent et comme ils le souhaitent.
Cyril Lage, président-fondateur de Parlement & Citoyens
“Dans l'association de demain, ce ne sont plus quelques bénévoles qui agissent pour tous les citoyens mais tous les citoyens qui s’engagent grâce à quelques bénévoles.”
LE COLLECTIF, UNE MODALITÉ FONDAMENTALE DE L'ENGAGEMENT
Son identité et celle des autres - c’est à l’importance du collectif dans l’action que Cécile Favé est surtout attachée. Le collectif est fondamental dans un projet ; il faut composer avec la réalités des personnes présentes, s’inspirer des personnes passées et savoir s’effacer devant celles qui arrivent. Une femme acquiesce et renchérit dans le public, c’est même grâce aux autres que commence l’engagement. “Seul on ne fait rien, le premier petit pas est d’aller voir un copain, un voisin, le frère d’une amie et de dire « Allez, on y va ! »”
Thierry Kühn, Cécile Favé, Mathieu Labonne, Cyril Lage
Et le collectif, c’est avant tout la coopération entre des individus. “Comment des gens qui manquent de temps peuvent animer une communauté de gens qui manquent de temps ?” Voilà la grande question de l’associatif que pose Mathieu Labonne à la salle pour conclure cet échange. Le numérique et les nouvelles pratiques commencent à ouvrir des chemins nouveaux pour y répondre. À chacun de nous de les mettre en œuvre à sa façon.
“Comment des gens qui manquent de temps peuvent animer une communauté de gens qui manquent de temps ?”
À la sortie, les participants sont invités à aller échanger de façon plus informelle entre eux et avec les intervenants. Un groupe se compose alors spontanément et décide d’aller passer ensemble la journée à Strasbourg en attendant le concert du soir. Pendant cette journée, à laquelle le groupe local Colibris a participé, tous ont créé du lien, partagé leurs envies et leurs initiatives, mûri des projets d’école Montessori, d’oasis, de rencontres… C’est comme si la tournée du Chant des Colibris avait tenu un immense pari le 27 mai à Strasbourg - donner aux gens les moyens de se rencontrer et de s’engager ensemble.
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