Drôme : Océane et Fabienne ouvrent un "drive" dans leur ferme… Et ça marche !
Dans la Drôme, la famille Bénistant produit depuis plus de cinquante ans, de père en fils puis en fille, légumes et fruits bio dans leur ferme des Lyonnettes de 10ha. Le grand père ayant été un précurseur du bio dans les années 60. La production est vendue d’ordinaire, sur le marché de Valence, mais aussi en magasins bio ainsi qu’à l’export via un grossiste local.
Mi mars, avec le confinement, soudain plus de marchés… Un choc brutal pour faire vivre une activité où le stockage n’est en outre pas possible. Mais Océane et sa mère Fabienne, d’habitude sur le marché, ne manquent pas d’ingéniosité ni de dynamisme. Encouragées par la Chambre d’Agriculture, elles innovent rapidement en lançant leur propre système de vente de paniers sur place, en mode drive. « Notre principale motivation était surtout de répondre à la pression de la demande, car nos clients ont insisté lors des derniers marchés pour qu’on ne les abandonne pas durant cette crise… » insiste Océane. Et Fabienne d’ajouter : « Nous avons des clients fidèles depuis des années, avec de vrais liens. Et justement, avant le Covid, on venait de prendre leurs mails pour organiser une visite festive de l’exploitation. Partie remise… »
Océane propose alors à ses clients par mail de venir jusqu’à la ferme, située à 15 mn de Valence. Puis elle inonde son réseau. Le bouche à oreille sur internet fait le reste… Et comme à plusieurs on est plus attractifs, mère et fille invitent trois autres producteurs à se joindre à elles afin de proposer une gamme de produits complémentaires sur leur point de collecte.
Deux ou trois paniers différents sont proposés par mail chaque semaine, à commander au plus tard le mardi soir pour une collecte le jeudi ; le contenu variant selon les récoltes du moment. Même principe de commandes par mail pour les trois autres producteurs, avec aussi la possibilité d’acheter directement sur place.
Le premier drive fermier se déroule le premier jeudi du confinement. Une réussite. Même s’il n’est guère facile pour les clients de trouver la ferme, malgré le plan sur le mail, (adresse inconnue sur Map…). Une fois sur place, les voitures font une boucle sur un vaste terre plein jouxtant l’exploitation, en s’arrêtant tout d’abord devant le stand fruits et légumes, où Fabienne et Océane les accueillent chaleureusement, avant de déposer dans leur coffre le panier commandé. Puis Chloé prend par la vitre le règlement par chèque correspondant. Aucun contact, tout le personnel est masqué et ganté ; les grands sacs kraft étiquetés par commande sont réunis sur un étal couvert et les clients n’ont pas à descendre de leur voiture.
Un peu plus loin, on trouve, selon le même principe, fromages et yaourts de brebis, volaille et viande de porc de Léo Girard, producteur d’un village voisin.
Vient ensuite le petit étal de la ferme Roux qui vend œufs, farines, céréales et légumes secs. Enfin, le stand de la ferme du Sabot, située dans le Vercors à presqu’une heure de là, présente ses picodons, St Marcellin et autres faisselles artisanales.
Partout, sourire et convivialité sont au rendez vous. On retrouve un peu l’ambiance du marché, pour peu qu’on ose descendre de sa voiture pour échanger quelques mots de loin ou acheter quelques compléments. L’occasion de sourire aussi en voyant à côté de la caisse du stand de fromages quelques pièces de monnaie tremper dans un pot d’alcool à 70… Radical !
Qu’y a-t-il de positif à tirer d’un tel système ? Pour les quatre producteurs réunis ici, après cinq semaines, le drive est un franc succès, avec pour le maraîcher un chiffre d’affaire décuplé : on est passé de 30 à 120 paniers en 5 semaines. « C’est grâce à la fidélité de nos clients, mais aussi à l’arrivée de nouveaux venus, dont certains ne consommaient pas bio jusqu’à présent. Et on n’a que des retours excellents, ça fait plaisir… », confie Océane. Et d’ajouter : « Ici, le côté humain a été mis en avant, les contacts sont plus complices, et pourtant sans contact physique ! Les clients apprécient de voir l’exploitation et sont reconnaissants de notre travail pour leur assurer une alimentation saine. Seul frustration : l’obligation récente de refuser des commandes car nous ne parvenons plus à fournir… »
Les raisons de cet engouement pour le consommateur : une prise de conscience de favoriser ces paysans en circuits courts, davantage de temps pour cuisiner sain, des ruptures de stock dans les grandes surfaces et la peur de s’y rendre… Claire, cliente pour la deuxième fois de ce drive fermier témoigne : « Au début, je suis venue par solidarité. Puis lorsqu’on a goûté aux fraises, aux pois gourmands, aux fromages – à tomber ! – et aux œufs frais, les enfants m’ont poussée à revenir la semaine suivante… Et maintenant, j’aurais du mal à retourner au Super U pour ces produits là. » Paul, venu à vélo, renchérit : « Et puis c’est vraiment cool, et je trouve que ça a du sens, surtout en ce moment. »
Et demain ? Même si, selon Océane, « ça demande pas mal de main d’œuvre et d’énergie en amont pour préparer les commandes, avec plus de contraintes que d’habitude », ce système pourrait perdurer et essaimer par la suite, à coté de la reprise des marchés traditionnels. Il faudra en tout cas tirer toutes les leçons d’une crise comme celle-là, encourager et poursuivre les modes de consommation locaux, rapprochant à nouveau producteurs et consommateurs.
Aller plus loin :
- La crise du coronavirus : un accélérateur de transition alimentaire ? / Colibris le Mag
Commentaires
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Connaissance
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Bravo pour votre initiative.Le bouche à oreille fonctionne très bien .A Paris des initiatives du même genre ont vu le jour et c’est génial.En passant par Valence un jour ,j’aimerai faire un détour par votre ferme
Continuez commme ça
Bravo encore
Claudine
L’adresse
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Bonjour, serait il possible d’avoir l’adresse ou un contact ?
D’avance merci