Briser l’isolement, pas seulement l’épidémie !
Ces mots qui nous enferment
Aperçu hier via les réseaux sociaux dans une boutique de Bruxelles : « Pour deux Corona, on vous offre une Mort subite ! » Ah ! nos amis Belges cultivent un humour salvateur, je trouve. Car depuis quelques jours une chape de plomb s’est brutalement abattue sur notre pays, sur l’Europe et une bonne partie du monde.
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Confinement, quarantaine, isolement, distances, et à présent « distanciation sociale »… Le lexique de cette guerre sanitaire menée contre le COVID-19 me laisse un goût amer en bouche. Et des images inquiétantes dans la tête. Celle d’une société de la peur, racornie et repliée sur elle-même, claquemurée et hostile au « autres », aux inconnus, hier aux étrangers, assimilés de plus en plus comme autant de menaces potentielles. Une société où triomphe le chacun chez soi et le chacun pour soi. Une foule qui volent des stocks de masques, de gels nettoyants ou qui se ruent sur le papier toilette et les paquets de pâtes.
Ne laissons pas s'installer une société où triomphe le "chacun chez soi"
Alors, oui, sans hésiter, je suis et serai responsable face à l’épidémie en adoptant les gestes et les mesures destinées à protéger la communauté qui m’entoure, et moi même – rappelons que ce virus tue tout de même jusqu’à 30 fois plus que la grippe saisonnière selon les classes d’âge, contrairement à ce qui peut se dire. Avec un objectif essentiel à ces « gestes barrières » : freiner autant que possible la propagation (inévitable) du virus, afin que la vague épidémique qui s’avance ne se transforme en déferlante qui provoque l’effondrement des services de santé. Et dans la foulée une mortalité énorme due au virus et à bien d’autres causes (accidents, maladies) que les hôpitaux ne seraient plus en mesure de soigner.
« Je suis inquiet que ce minuscule être vivant ne fasse que dévoiler les immenses fractures et fragilités de nos sociétés » Gilbert Deray, hôpital Pitié-Salpêtrière
Je n’entrerai pas, à cette heure, dans la critique de la gestion sanitaire par le gouvernement, parfois incohérente et critiquable. D’abord parce que l’on connaît encore mal l’évolution de cette bestiole microscopique, de toutes ses voies et dynamiques de transmission, de sa capacité à muter, pas plus que l’ampleur et la durée de cette épidémie, qu’on pressent tout de même dévastatrice au niveau sanitaire, économique et sociale… Et puis parce que face à cette crise aussi brutale, complexe qu’inédite, les « ya-ka fo-kon » ou les théories du complot qui bourgeonnent sur la Toile n’aident en rien nos communautés à y faire face. Au risque d’ajouter de l’anxiété à une situation qui n’en manque déjà pas !
Cultiver la fraternité loin du virus
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Mettons plutôt des actes solidaires et responsables face à ces mots et pensées mortifères. Ce qui m’anime aujourd’hui est de réfléchir ensemble à améliorer le quotidien des communautés d’habitants dans un contexte de confinement dont on devine qu’il va durer plusieurs semaines et qui se durcit chaque jour. Mon attention : celle de briser l’isolement des personnes en plus de la chaîne épidémique. Briser le repli qui guette nos territoires, au dépend des plus fragiles.
Cela peut passer par divers gestes au quotidien, à tester individuellement et enrichir collectivement. Quelques idées me viennent à l’esprit : prendre régulièrement des nouvelles, par téléphone, de ses proches bien sûr, mais aussi de ses voisins ; proposer son aide à des parents en activité, qui se retrouvent avec leurs gamins à la maison ; prêter un ordinateur non utilisés à certains gamins pour pouvoir suivre leurs cours à distance ; partager sa connexion wifi avec un voisin pour cela si besoin ; offrir du soutien scolaire ; prêter des livres ou des vidéos inspirants pour petits et grands ; faire des courses pour des personnes vulnérables ou à mobilité réduite ; proposer des parties de cartes ou des jeux en ligne, une veillée musicale ou avec des lectures théâtrales par visio conférence ; des plats gourmets et simples à confectionner que l’on dégusterait ensemble… à distance une fois par semaine. Etc.
Mettons des actes solidaires face aux mots mortifères
Ce weekend, ma coopérative bio Terre Mère (Bédarieux, 34) envoyait ce message à tous les adhérents : « Nous proposons de préparer les courses une fois par semaine aux adhérents(es),les plus fragiles, les plus âgés, les plus isolés et inquiets. Nous ne prévoyons pas de livraisons à domicile (sauf exceptionnellement pour ceux qui ne peuvent se véhiculer). [...] Si vous avez un voisin ou une connaissance qui ne peut pas se déplacer nous pouvons préparer les commandes afin que vous puissiez leur apporter. »
Réjouissant ! Dans les jours et les semaines à venir, des milliers d’actions solidaires et de mise en lien de ce type vont se multiplier, j’en suis certain. Colibris va réfléchir à comment les accompagner et les amplifier au mieux dans les territoires. C’est essentiel pour faire face ensemble à cette épreuve. Et combattre l’abattement et la morbidité qui nous menacent, en mettant en lumière la part créative, sensible, joyeuse, solidaire et responsable de notre humanité.
Penser la mer après la vague
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Au-delà de l’épidémie qui monte et des inquiétudes qu’elle suscite, je m’interroge enfin sur après-demain. Sur notre capacité individuelle et collective à tirer les leçons de cette épreuve. Car, ne nous y trompons pas, ce n’est pas la première pandémie ni la dernière. Les bouleversements écologiques– et notamment des habitats naturels, qui favorisent l’émergence de maladies animales capables d’affecter les humains – et climatiques, l’accélération de la mondialisation vont les multiplier. Demain se prépare aujourd’hui, en réalité. Et je me dis que trois principes peuvent nous aider collectivement durant ces crises : favoriser les biens communs, la résilience de notre économie en relocalisant des secteurs vitaux notamment, et la solidarité au sein de la société.
Quelle capacités individuelle et collective aurons-nous à tirer les leçons de cette épreuve ?
Prenons les seuls exemples de la santé et de la recherche. Cette crise révèle à nouveau la précarité de nos structures de santé, soumises depuis des années à des logiques comptables qui érodent les moyens humains et les équipements, qui épuisent les personnels de santé. Elle renforce également l’inégalité de l’accès aux soins dans le pays. Y remédier suppose des choix budgétaires, de décloisonnement des filières médicales et d’organisation courageux, mais aussi un engagement fort de chacun. De même, la recherche scientifique doit pouvoir se déployer sur un temps long et dans l’intérêt commun, indépendant de financements particuliers et spéculatifs. Elle a besoin d’un soutien durable pour permettre de mieux préparer nos sociétés aux bouleversements à venir, en matière épidémique, mais aussi alimentaires, climatiques, etc.
Voilà, nous pouvons conjuguer responsabilité et « jouer collectif » face au repli et à l’isolement, nous mettre dans une dynamique créatrice et vitale face à l’épidémie, et penser ensemble l’océan après la vague. « Je suis inquiet que ce minuscule être vivant ne fasse que dévoiler les immenses fractures et fragilités de nos sociétés, lançait Gilbert Deray, chef du service de néphrologie à la Pitié-Salpêtrière (Paris) dans une lettre ouverte la semaine dernière. Les morts qui se compteront alors peut-être par millions [dans le monde] seront ceux de l’affrontement des individus dans l’indifférence totale de l’intérêt collectif. » À nous tous de lui démontrer qu’il se trompe...
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Pour en savoir plus
- Pour faire face à la désinformation, nous vous conseillons cette très bonne synthèse en libre accès du service des Décodeurs du quotidien Le Monde. Ce journal a d’ailleurs ouvert en accès libre l’ensemble de ses articles sur le sujet.
- Site officiel sur le mesures adoptées par le gouvernement.
- Confinés, les Italiens chantent / Huffington Post
Commentaires
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Vraiment, quel beau et bon texte.... merci. J'aime les Colibris. Je suis avec vous, dans mon Québec où il y en aussi des Colibris, mais si peu, si peu, il me semble..... j'en parle aux médias, rien. Qqs amis écoutent, les autres sont ailleurs. Mais où? Je ne pourrais le dire... je vais faire circuler ce texte résolument tourné vers le bien et verrai. En attendant, je suis inscrite au "Sommet de la conscience", car ça m'aide et aide mes enfants et qqs amis. C'est des gens comme vous, du collectif "ensemble vers un monde meilleur" alors jetez-y un coup d'oeil si le coeur et l'intellect vois en dit. Belle journée à tous. Amicalement Julie
CONFINEMENT EN VILLE
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Que dire qui n'a pas été dit sur cet étre invisisble à l'œil nu qui tue plus qu'une guerre armée ? la peur pour soi , l'angoisse pour nos familles , nos amies et amis , nos voisins , le boulanger du coin de la rue , la caissière au joli sourire ….. la peur s'est installée en mettant à jour notre incapacité à tuer cette "bête" qui va décimer les plus fragiles de la population mondiale .
Cette pandémie est le résultat d'une sociéte de surconsommation qui va chercher au bout du monde des matériaux à bas prix fabriqués par des etres humains sous payés . Avions nous réellement besoin de toutes ces choses qui nous encombrent les placards et que l'on finit par jeter ?
Bon courage à tous et préservez vous , de beaux jours se préparent
Merci pour ce message d
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Merci pour ce message d'espoir, qui fait tellement de bien, qui fait écho à ce que je ressens, à mon désarroi. Cette crise me rend tellement impuissante dans ma recherche de solidarité. Il va falloir faire preuve de créativité, mais nous en sommes capables.
...
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Vous pointez encore du doigt les "théories du complot" mais faut croire qu'elles commencent à se vérifier. Cette crise sanitaire annonce une crise encore pire, celle du contrôle total. Alors plutôt que de dénigrer, informez-vous et vous verrez qu'il n'y a jamais de fumée sans feu !!